8 mai 2009

Investigation Marathon

Après les premières interviews à la capitale, après m’être plongée dans la Constitution dominicaine, dans le Code du Travail, la Loi de migration (non encore appliquée faute de règlement d’application…), les Conventions internationales et la Convention des Droits de l’Homme évidemment, le travail de terrain a commencé, en étoile depuis Dajabon. Identifier les acteurs clés, former les groupes focaux, recruter une équipe d’enquêteurs, continuer les interviews, préparer les outils de travail (questionnaires d’enquêtes, guides d’interviews, etc), chercher, encore et toujours, à mettre la main sur une liste des plantations agricoles de la province de Montecristi et à défaut, croiser les infos glanées de-ci de-là, pour tenter de déterminer l’échantillon … Bref, une course poursuite infernale, des allers-retours entre les différentes villes, en guaguas lentes et inconfortables, des rdvs souvent inutiles, parfois constructifs, qui mènent à d’autres rdvs, des discussions qui ne mènent à rien, du temps perdu, des soirées et des week end consacrés entièrement au boulot!

Et puis enfin, les premières réunions, des questions ouvertes, des réponses éloquentes ou consensuelles selon les groupes, selon les intérêts et ce we, un marathon d’enquêtes avec les travailleurs migrants, chez eux, dans leurs communautés, que nous avons parfois du chercher pendant des heures avant enfin de mettre la main sur le premier ouvrier et puis sur des centaines parfois désireux de rendre compte de leur situation, parfois craintifs que ces révélations arrivent aux oreilles des employeurs qui risqueraient de les virer, ou pire, de les déporter. Qu’importe pour certains, cela ne sera pas la première fois et ils reviendront encore et toujours parce que les plantations auront toujours besoin de travailleurs haïtiens à exploiter et qu’eux, auront toujours besoin de travail pour essayer d’assurer la survie de leur famille en Haïti.

Je pourrais vous donner mes impressions mais j’anticiperais les résultats de l’investigation, je me tromperais peut être car il convient de dépouiller les questionnaires, de mettre sur pied les statistiques, de croiser les différentes sources d’informations et de les analyser au regard de la législation de référence… mais ce que je peux déjà vous dire c’est que ces gens vivent dans des conditions déplorables, qu’ils sont soumis, pour la majorité, à une exploitation terrible et que leur condition de sans-papier induit non seulement la précarité dans laquelle ils vivent quotidiennement, mais également un traitement discriminatoire et abusif de la part des autorités dominicaines (police, armée, autorités de la migration, état civil –puisque les enfants haïtiens nés sur le territoire dominicain se voient refuser la nationalité dominicaine faute pour leur maman d’être documentée, et ce au mépris du ius soli encore prévu par la Constitution jusqu’à l’approbation définitive de la substitution de celui-ci par le ius sanguini …- écoles –puisque les enfants apatrides se voient également refuser l’accès à l’enseignement, etc) ainsi que de la part d’une certaine frange de la population dominicaine toujours hostile à l’envahisseur haïtien.

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